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Cher vétérinaire...

Cher vétérinaire...

En préambule: âmes sensibles s'abstenir 😎

 

Ça fait un moment que ce sujet délicat me chatouille, et enfin je me suis décidée à l'aborder. Il s'agit d'un serpent de mer pour notre profession: le coût des soins, scandaleusement chers, et de plus en plus. Et quand l'actualité n'est pas assez anxiogène pour nos chers médias, tous de qualité (mais bien sûr!), on tape un peu (beaucoup) sur les vétos.

Et ce samedi 27 Avril, alors que je finis tranquillement ma semaine de bricolage/détente/gastronomie, voilà que M6 en rajoute une petite (grosse, très grosse) couche dans son 19h45 😡. Inutile de préciser que ça a fait jaser les confrères...c'est donc comme ça que j'en ai été informée (pas de télé cette semaine, ça oxygène le cerveau).

Si le visionnage de cette émission vous intéresse, le lien ci-dessous:

Ma profession est paradoxale: dans l'imaginaire collectif, le vétérinaire est un professionnel qui aime les animaux et qui dédie sa vie à leurs soins, sans compter son temps et son énergie. Il est idéalisé comme un super bénévole, sans vie privée ni nécessité d'être rémunéré (ou alors une somme symbolique à la discrétion du propriétaire de l'animal en question, un pourboire quoi) pour son travail. Parce que son travail est une passion, et une passion, c'est bien connu, suffit à nourrir celui ou celle qu'elle anime!

J'ai un scoop pour vous, chers lecteurs.... Tadaaaaam! C'est faux! Le vétérinaire vit de son métier, et donc facture ses actes. Et souvent, ces actes sont onéreux, car techniques et nécessitant des appareillages coûteux et des personnes formées pour les faire fonctionner correctement.

On s'est bien éloigné du vétérinaire originel, travaillant seul, doté de quelques instruments basiques et d'un solide sens clinique, qui n'avait comme frais de fonctionnement que le fourrage de sa monture qui l'emmenait de patient en patient.

Bien que, dès leur création dans la 2ème moitié du 18ème siècle, la durée des études ait été de 5 ans (pour les plus performants , 3 ans pour les autres) dans les Écoles françaises , la médecine vétérinaire a énormément évolué jusqu'à nos jours, pour proposer aujourd'hui une prise en charge proche de celle de le médecine humaine. Oui, je n'ai pas peur d'écrire qu'aujourd'hui, parfois, un animal est mieux pris en charge qu'un humain pour une pathologie équivalente. La médecine vétérinaire moderne suit une évolution positive en termes de connaissances et d'équipements techniques, contrairement à ce que la médecine humaine pourrait sembler faire, en tout cas concernant l'efficacité et la rapidité de prise en charge des patients de chaque discipline.

Et si le vétérinaire reste en majorité un généraliste, médecin et chirurgien, il a pu accumuler d'autres compétences et progressivement proposer des analyses sur place, des examens d'imagerie, des installations destinées à optimiser l'hospitalisation et les soins intensifs. Et ô surprise! Ça coûte des sous tout cet attirail! Sans parler de notre obligation de formation continue afin de mettre régulièrement à jour nos connaissances et techniques.

Bon, je ne vais pas vous mentir, j'avoue être régulièrement tiraillée entre la nécessité de faire tourner ma structure (et je ne suis pas seule pour ça, je le rappelle, nous sommes 6 personnes, vétos et assistantes) et de faire en sorte qu'elle soit rentable, et le fait de savoir qu'une partie des propriétaires d'animaux qui franchissent le seuil de celle-ci n'ont pas de gros moyens financiers.

Mais! Car il y a un mais à cette problématique:

-qu'appelle-t-on rentabilité? En ce qui me concerne, c'est le fait d'arriver à me verser un salaire que JE juge décent, en tenant compte des faits suivants:

*j'ai plus de 30 ans d'expérience, j'ai acquis grâce à de coûteuses formations des compétences qui valorisent mon diplôme, même si à la base il se suffisait à lui-même; idem pour mon associée (car nous sommes deux irresponsables à avoir sauté dans le grand bain ensemble 😅)

*j'ai créé une clinique en partant de zéro, donc en produisant au fil des années de la richesse, en embauchant et donc en payant des charges, des impôts de toutes sortes, qui provisionnent entre autres les très généreuses aides de toutes sortes que notre formidable pays a su (via ses gouvernements successifs et leur vision court-termiste de l'économie) imaginer

---Et là je fais juste un aparté sur une particularité française concernant les aides sociales: Je suis issue de la France profonde, celle qui se lève tôt pour trimer afin de boucler les fins de mois, sans avoir de perspective autre que posséder son logement et ne pas être trop malade à la retraite pour profiter un peu des réunions du 3ème âge à la salle commune la plus proche. J'ai été biberonnée à la solidarité ouvrière, chez des grands-parents qui ont traversé la 2ème guerre mondiale et ses pénuries, et ont donc toujours cultivé leur potager pour pouvoir mettre sur la table ces fruits et légumes tant vantés par les nutritionnistes, mais tellement chers qu'on trouve la majorité des obèses dans les classes sociales les plus modestes , un hasard?. Bref, je suis tout à fait favorable à participer au pot commun (ministère des finances), mais à condition que mon argent soit utilisé intelligemment (et j'ai beau avoir toujours voté pour avoir le droit de râler après, jamais aucune promesse dans ce sens n'a jamais été tenue). Je trouve normal de financer des systèmes qui protègent effectivement les plus fragiles, par contre je m'insurge contre les dérives de tels dispositifs...je crois qu'on est nombreux dans ce cas, mais manifestement pas assez, ou trop occupés à bosser pour payer les factures, pour trouver du temps pour bloquer les ronds-points (gnagnagna, je suis certaine que vous avez la ref)---

*j'ai pris le risque de rester indépendante, malgré la lourdeur administrative qui appesantit le statut de chef d'entreprise, malgré le nombre hallucinant de normes, de codifications (on en parle du code du travail et du fait que l'état se désengage de tout un tas de sujets en comptant sur l'entreprise pour y pallier?). J'ai déjà évoqué dans un autre article les contraintes de ce type d'exercice, le lien ici :

https://vetinclermont.fr/2024/01/der-de-der.ou-comment-arreter-quelque-chose-qui-casse-les-pieds-les-gardes.html

*j'ai fait le choix d'un confort de travail, pour moi (véto) avec des appareils coûteux mais à mon sens indispensables pour répondre aux attentes actuelles des propriétaires d'animaux (qui, aujourd'hui, attend plusieurs jours un résultat d'analyse ou un rendez-vous d'échographie, alors que la réponse peut être apportée dans la journée?), pour les assistantes en leur évitant de se transformer en robot multi-bras puisqu'elles ne sont quasi jamais seules pour assumer leurs tâches.

Petit rappel: nous sommes des couteaux suisses

Alors , bien sûr, on pourra me donner des tas d'exemples de vétérinaires qui ne s'équipent pas, restent seuls, et travaillent très bien quand même...moi ça ne me fait pas rêver, et si j'ai encore envie d'aller bosser, c'est en partie parce-que j'ai fait ces choix!

*je précise que je ne finance ni yacht, ni maison à St Barth 🤣

-La rentabilité c'est aussi pouvoir investir , entretenir sa structure, se former, payer ses salariés, mieux que le minimum si c'est possible, et sûrement plein d'autres choses que j'oublie.

-l'autre aspect de la problématique: les moyens déployés par les propriétaires d'animaux de compagnie quand ils sont confrontés à la maladie ou à un accident...voire pour les soins normaux en fait.

Il est clair que posséder un animal est un droit, ce qui n'empêche pas d'être averti de ce que cela implique. Je vois encore trop d'ab...de gens qui s'étonnent des contraintes associées à la possession d'un animal de compagnie (oui paradoxalement on en est propriétaire, même si aux yeux de la loi c'est un être sensible). Un chien, un chat, ça se stérilise, ça se vaccine, on le déparasite régulièrement pour lui éviter, ainsi qu'à ses proches humains, de choper des tas de cochonneries, et puis ça se nourrit aussi, et pas avec de la Me...rde (pensée émue pour le regretté Jean-Pierre Coffe) bio, sans céréales, voire végan...mais où va-t'on? Et dans la même veine, on s'émeut dans ces émissions racoleuses des prix pratiqués dans les structures vétérinaires, mais on ne tique pas de voir des tarifs de communication animale, gemmothérapie et autres services de charlatans que personne n'inquiète pour vendre du mensonge à la pelle et profiter de la détresse des gens, voilà voilà...

A l'ère d'internet et des multiples réseaux d'information, de l'ultra-connexion, ne venez pas arguer que ces gens ne pouvaient pas savoir! Je refuse d'y croire. Un animal de compagnie est aujourd'hui considéré comme un membre à part entière de la famille qui l'accueille. Les sites de vente pour animaux, ce marché en général se développe à la vitesse grand V, et celui qui a le budget pour le dernier Iphone ou un casque audio à plusieurs centaines d'euros ne pourrait pas financer une 1ère visite chez le vétérinaire, qui en profitera pour l'informer de tout ce qui est important pour la bonne santé de son "bébé"?

Vaste débat

En ce qui me concerne, j'ai ma conscience (professionnelle) pour moi: au bout de 20 ans, on connaît un peu sa clientèle, on s'est un peu débarrassé du syndrome de l'imposteur (très présent dans notre profession), bref on a suffisamment roulé sa bosse pour savoir facturer "en bon père de famille" comme stipulé dans notre code de déontologie. Sur les cas lourds, nous discutons entre vétos si nous sommes mal à l'aise pour facturer (et il nous arrive de nous asseoir sur des honoraires, si si!). Et surtout, surtout nous faisons en sorte de toujours avoir l'accord du propriétaire, notamment quand son animal est hospitalisé et que cela peut durer. Pas de mauvaise surprise quand pas de surprise. Sachant que la mauvaise surprise c'est d'avoir eu le feu vert (consentement éclairé) mais de se retrouver avec un chèque en bois ...c'est le jeu ma pauv'Lucette! Ahhhh les mauvais payeurs, ils font preuve de beaucoup d'imagination parfois, ils feront peut-être l'objet d'un article un jour ...

 

Mais à part ça...le vétérinaire c'est CHER!

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